Ondes, vibrations, Instabilités et turbulence

DSHE

Cet axe regroupe l’étude de systèmes physiques solides ou fluides caractérisés par leur comportement dynamique, souvent relevant de la physique non-linéaire. Certaines situations abordées peuvent être décrites avec un faible nombre de degrés de liberté,  tandis que d’autres requièrent une approche statistique. On s’intéresse en particulier aux vibrations mécaniques et à la propagation d’ondes, ainsi qu’ à la turbulence, qu’elle soit hydrodynamique ou bien résultant de l’interaction faiblement non-linéaire entre des ondes.

 

 

 

Instabilités de méandrage

Un filet liquide injecté entre deux plaques parallèles rapprochées adopte spontanément une trajectoire sinueuse au-dessus d’un débit seuil, quand les forces inertielles dominent les forces capillaires. Nous avons récemment découvert une nouvelle instabilité du filet à des débits quelconques, lorsqu’on le force acoustiquement à l’aide de haut-parleurs placés sur les côtés de la cellule (cf. figure). Cette instabilité résulte d’un couplage non-linéaire entre une modulation de la section (variqueuse) et une modulation de la trajectoire (sinueuse) sous l’effet du forçage latéral. La longueur d’onde des perturbations amplifiées par ce couplage —le forçage lui-même est homogène— est déterminé par la vitesse d’écoulement du liquide, la vitesse des ondes sinueuses, et la fréquence de forçage, de sorte à verrouiller en phase les ondes sinueuses et variqueuses.

Participants :
Adrian Daerr.

Thèse de Grégoire Le Lay

 

 

Légende :  (a) Montage expérimental, l’huile mouillant les parois de la cellule Hele-Shaw forme un pont liquide sur la hauteur de la cellule. (b) L’instabilité observée sous forçage acoustique couple un mode variqueux et un mode sinueux (tracés séparément en rouge et bleu, à droite) dérivant à des vitesses différentes. 

Acoustofluidique

L’étude du mouvement de fluides induit par vibrations mécaniques ou acoustiques se nomme acoustofluidique. Nous appliquons des vibrations à grande amplitude de forçage soit avec des solides vibrés en géométrie confinée ou étendue , soit dans des canaux micro-fluidiques avec des structures anguleuses, ainsi que sur des gouttes posées. Nous étudions le couplage entre le forçage et des conditions de bord complexes telles que la surface libre ou la géométrie confinée. Ces conditions de bord influencent l’écoulement produit et les déformations de la surface libre.
D’autre part, les recherches menées en acoustofluidique pourraient être utilisées pour le dégivrage de surfaces, lorsque des gouttes d’eau condensent et gèlent sur une surface froide. Le décollement de la couche de givre est un problème d’intérêt industriel, en particulier en aéronautique.

Participants : 
Philippe Brunet, Adrien Bussonnière (MSC, DOMM)

Ondes non-linéaires dans un tore de fluide

Grâce à une technique originale, nous avons réussi à créer expérimentalement un tore stable de liquide et à obtenir les premières mesures de ses fréquences de résonance, ainsi que la relation de dispersion complète des ondes azimutales le long d’un tore. Concernant les ondes nonlinéaires
dans cette géométrie torique, nous avons rapporté l’observation de nouveaux solitons, dus à la périodicité du système, avec des différences significatives par rapport à la géométrie rectiligne classique type Korteweg–de Vries.

Participants :
Eric Falcon, Chi-Tuong Pham.

Thèse de Filip Novkoski

Auteur Filip Novkoski

Légende : Cette image de tore liquide a été l’une des lauréates du concours Méca-Pixel du CNRS 2022 et classée 1ère du concours la Preuve par l’Image 2022 du LabEx SEAM.

Turbulence d’ondes de surface

Bien que d’un intérêt primordial en océanographie, la turbulence d’ondes est un phénomène qui reste encore mal compris. Il concerne la dynamique d’un ensemble d’ondes aléatoires en interaction non linéaire. Les moyens mis en œuvre pour son étude expérimentale sont diversifiés : en laboratoire, grand bassin à vagues de l’Ecole Centrale de Nantes, expérience en impesanteur (vols paraboliques et Station Spatiale Internationale) pour sonder la turbulence d’ondes purement capillaires ou au sein de la centrifugeuse de l’ESA pour obtenir une situation en hyper-gravité. Récemment, l’existence de la turbulence d’ondes unidimensionnelle a été mise en évidence au laboratoire, ainsi que le régime de cascade inverse (vers les grandes échelles) de la turbulence d’ondes de gravité, et une transition de la turbulence d’ondes vers un régime d’ondes de chocs lorsque le système devient non dispersif. Pour plus d’informations, voir cette page ou une récente revue de synthèse sur la turbulence d’ondes.
 
Ces études sont financées par différentes ANR, et par la Simons Foundation (USA) au travers une collaboration internationale.
 

Participants :
Eric Falcon

Thèses de Guillaume Ricard et d’Annette Cazaubiel

 

Légende : Ensemble d’ondes aléatoires en interaction non linéaire à la surface d’un bassin de 50 m x 30 m x 5 m à l’Ecole Centrale de Nantes. Crédit : E. Falcon.

 

Turbulence d’ondes capillaires en impesanteur

Pour mieux s’approcher du cadre théorique de la turbulence d’onde, des expériences de turbulence d’ondes capillaires en impesanteur ont été effectuées dans la station spatiale internationale (ISS) dans le cadre de l’expérience Fluidics ( collaboration LPENS, CNES, ESA). Dans ce cas, l’effet de la gravité est suprimée et les forces de tension de surface sont le seul mécanisme de rappel. 

Participants :
Michael Berhanu, Eric Falcon,

 

 

Légende : A gauche, Thomas Pesquet mettant en place l’expérience Fluidics dans la station spatiale internationale. Crédits CNES, CADMOS. En haut à droite, image instantanée du réservoir instrumenté utilisé pour étudier la turbulence d’ondes capillaires. Le réservoir est une sphère de 10 cm de diamètre remplie à 40% d’eau. Les vagues à l’interface eau/air sont mesurées par des capteurs capacitifs. En bas, à droite, spectre de puissance de ces vagues, pour une fréquence de forçage de 1.7 Hz. On obtient un spectre en loi de puissance sur une décade et demi pour les deux capteurs en accord avec la prédiction théorique.

Solitons et turbulence intégrable

 

Dans le cadre d’une collaboration avec une équipe d’optique non-linéaire à l’université de Lille et l’école Centrale de Nantes, on s’intéresse à un régime statistique d’ondes non-linéaires, appelé turbulence d’ondes intégrable, correspondant à des champs de vagues composés de nombreux solitons. Par des mesures dans un canal instrumenté de 150 m à l’école Centrale de Nantes, la première synthèse contrôlée d’un gaz dense de solitons à partir d’ondes aléatoires de gravité a pu être obtenue. Avec ce même canal, l’émergence spontanée de solitions dits de Peregrine a été aussi observée à partir d’un champ de vagues aléatoires, ce qui constitue une explication possible d’apparition des vagues scélérates ou “rogue waves“.

Participant :
Eric Falcon

Thèses de Guillaume Ricard et d’Annette Cazaubiel

 

 

Légende : Vue du canal de 150 m de l’École Centrale de Nantes dans lequel la caractérisation des vagues scélérates a été effectuée. Crédit photo : Éric Falcon

Turbulence hydrodynamique tridimensionnelle

Un nouveau mécanisme de forçage de la turbulence hydrodynamique en volume a été mis au point au laboratoire MSC en utilisant en suspension dans l’eau des particules aimantées mises en rotation par un champ magnétique extérieur oscillant. Cette méthode a permis d’obtenir la première observation expérimentale du régime d’équilibre statistique des grandes échelles en turbulence hydrodynamique tridimensionnelle (3D), un régime prédit il y a 70 ans. Ces résultats ouvrent la voie à l’utilisation de concepts de la mécanique statistique à l’équilibre pour décrire les grandes échelles des écoulements turbulents 3D, avec des applications potentielles à la dispersion de polluants à grande échelle par la turbulence.

Participants :
Eric Falcon, Jean-Baptiste Gorce, Jean-Claude Bacri

Thèse d’Annette Cazaubiel

 

 

Légende: Image des trajectoires de traceurs de 50 µm dans un plan horizontal de 30 cm par 30 cm au sein de la turbulence tridimensionnelle.
Paramètres d’injection d’énergie : 55 particules magnétiques ; champ magnétique alternatif de fréquence 20 Hz et d’amplitude 294 G.

©J.-B. Gorce et E. Falcon

Transport d’une chaîne de particules sur un potentiel périodique

Nous nous intéressons à une modélisation simple du transport de molécules en milieu très confiné, en considérant une chaîne de particules soumise à un potentiel périodique extérieur. Même le cas le plus simple, celui du dimère, a déjà une dynamique étonnamment riche. Ce système a un mode de vibration interne et
un mode de translation, et le potentiel périodique sous-jacent induit un couplage non linéaire entre ces modes. Nous avons pu montrer que ce système appartient à la classe des systèmes autoparamétriques, pour lesquels un des modes de vibration excite paramétriquement les autres (l’autre, dans le cas du dimère).

Participants : 

Christophe Coste, Michel Saint Jean

Thèse de Johann Maddi

 

 

 

 

Légende : De gauche à droite : Amplitude de vibration des modes 10, 11 et 12 d’une chaîne de 23 particules en translation sur un potentiel périodique

Oscillateurs couplés

Un oscillateur harmonique à deux degrés de liberté  peut être aisément réalisé à l’aide de deux pendules couplés par un ressort spiral, le tout dans la limite des petites oscillations. La mise en évidence et l’étude des modes propres d’un tel « dipendule » constituent un exemple introductif aux systèmes couplés. Mais on peut pousser beaucoup plus loin l’analyse d’un tel dispositif. On peut par exemple, à l’aide des variables de Glauber de chaque pendule, construire trois quantités (mx, myy, mz) dont les relations de commutation classiques (crochets de Poisson) sont celles d’un moment cinétique. Le dipendule apparaît ainsi formellement comme un spin 1/2 plongé dans un champ magnétique (lié à la raideur du ressort qui couple les pendules). Une modification paramétrique de la longueur d’un des deux pendules permet alors de simuler un champ magnétique tournant. Ce système permet ainsi de simuler (presque) toutes les expériences de RMN réalisables avec des spins 1/2. Après avoir transposé les précessions de Larmor et de Rabi, nous avons ainsi mis au point une version mécanique du célèbre « passage adiabatique rapide ».

Participants :
Thierry Hocquet, Martin Devaud

Légénde : A gauche, dispositif expérimental. Les deux pendules peuvent tourner librement autour de l’axe (A) et sont couplées au moyen d’un ressort de torsion
de torsion de raideur angulaire C. Grâce à une poulie à gorge et à un de traction, la masse gauche M peut être glissée le long d’un couple de tiges de telle sorte qu’aucun couple n’est exercé sur (A) : le glissement de cette masse met donc en œuvre une excitation paramétrique pure du système à deux pendules.  A droite, illustration du passage adiabatique rapide. Crédits Thierry Hocquet (2022).